Et si l’horreur était une composante de nos sociétés les plus anciennes, qui n’a fait qu’évoluer et changer de formes au fil des siècles, et des civilisations ? C’est ce que propose le documentaire Woodlands Dark and Days Bewitched, disponible sur la plateforme de screaming Shadowz. Réalisé par Kier-la Janisse, le documentaire nous propose de plonger dans les contrées d’un sous-genre de l’horreur qui a eu un impact important dans le cinéma de genre : la folk horror. Divisé en 3 parties d’une petite heure chacune et divisé en 6 chapitres, cet impressionnant travail de recherche est le résultat de plusieurs années de dur labeur. Au vu de l’impressionnant CV de la cinéaste qui est également auteure et éditrice à ses heures perdues, il n y a aucun moyen de douter de la qualité de ce documentaire.
C’est un travail scientifique que nous propose Kier-la Janisse au travers de ces 3 heures de documentaire, faisant intervenir des noms connus du cinéma et du folk horror qui ont contribué à son développement, ou à sa théorisation scientifique. De Haxan (1922), en passant par The Feast (2021), le documentaire se propose de retracer près de 100 ans de folk horror, au travers d’une analyse sociologique et historique et même anthropologique.
Car oui, là où Woodlands Dark and Days Bewitched prend toute sa forme, c’est dans sa manière d’utiliser le film comme une source historique. En outre la folk horror (littéralement horreur du peuple) est un sous-genre qui s’est construit sur les mythes et croyances de tout type de civilisation. Ainsi, il n’y a pas un seul type de folk horror, mais il y en a de multiples variétés, qui ont toutes leurs caractéristiques propres, en fonction des peuples. Originaire d’Angleterre qui l’a popularisé grâce à la trilogie de Michael Reeves (The Shea Beast, The Sorcerers, Witchfinder General), on qualifie souvent ce sous-genre de l’horreur comme étant un phénomène 100% british. Toutefois, ce que montre le documentaire, et à raison, c’est que la folk horror est un sous-genre multiculturel, c’est cette multiculturalité qui fait la force de cette horreur qui est tapie au plus profond de nous, de nos croyances et de nos contes
Car oui que ce soit les sorcières, le voodoo, le paganisme, ou même l’islam et le christianisme, toutes ces figures, et tous ces courants religieux sont des bases sur laquelle plusieurs sociétés vont s’appuyer afin de créer une horreur spécifique. Cette horreur, elle vient du plus profond de la terre, de la nature, bref c’est une horreur qui se nourrit de l’origine de l’être humain et de son environnement naturel. Ici est donc toute la complexité de cette horreur multiple que le documentaire arrive à retranscrire avec une précision sans pareil.
Plus qu’une question de folklore, la folk horror est aussi une question de lutte de classe, mais aussi une question raciale. En outre, celle-ci est également utilisée comme moyen de montrer les tensions entre des civilisations plus traditionnelles, et nos prétendues civilisations modernes, au travers des questions d’assimilations religieuses, de hiérarchisation des ethnies. Ainsi l’intérêt de la folk horror réside dans sa portée sociale et religieuse très symbolique. Elle met à nu les sociétés ainsi que les problèmes cachés qui peuvent la gangréner. Elle propose ainsi un retour à l’authenticité et aux fondements de nos sociétés.
Woodlands Dark and Days Bewitched est ainsi un documentaire complet, très bien sourcé qui développe une réflexion quasiment universitaire sur la folk horror, on espère ainsi que cette réalisation permettra à de nombreux spectateurs et de nombreuses spectatrices de découvrir plus en profondeur ce sous-genre horrifique parfois mis de côté, ou contesté.











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