Réalisé par Hifumi Kono, développé par Human Entertainment et sorti en 1995, Clock Tower est un jeu-vidéo en 16 bits sorti à la base sur Super Famicom au Japon qui dépeint un univers atmosphérique inspiré par les films du maestro de l’horreur italienne, Dario Argento. Nous suivons l’histoire de Jennifer Simpson, inspirée par Jennifer Corvino (interprétée par Jennifer Connelly) dans le métrage culte Phenomena sorti en 1985. Clock Tower s’inspire largement des univers cinématographiques mis en scène par le réalisateur italien emblématique du giallo mêlant à la perfection thriller et horreur. Avec sa robe bleu foncé et sa chemise blanche, Jennifer Simpson se révèle être une orpheline vivant dans un pensionnat, tout comme Jennifer Corvino internée dans un pensionnat suisse dans lequel elle découvrira de sinistres meurtres et deviendra la proie d’un maniaque.
Disponible sur Steam et sur Switch, Clock Tower Rewind est la version améliorée de l’original qui dispose de nouveautés comme l’introduction animée, des musiques d’ouverture et de fin de Mary Elizabeth McGlynn (saga Silent Hill) et Emi Evans (saga NieR), un livret du jeu, une galerie d’illustrations, des cinématiques en motion comic, un lecteur de musiques, ainsi qu’un long entretien avec le créateur du jeu : Hifumi Kono. Avec son gameplay en 2D, son manoir en 3D, ses effets sonores suffocants et son OST électronique hypnotisante, Clock Tower s’inspire du slasher et du giallo, faisant de ce jeu d’horreur japonais un hommage au cinéma d’horreur occidental.

Le récit nous transporte en Norvège en 1995. Accompagnée de ses amies, Jennifer arrive au manoir Barrows, surnommé Clock Tower grâce à son clocher qui surplombe le domaine. Les filles viennent d’être adoptées par cette famille de riches nanties et leur nouvelle matriarche Mrs. Mary Barrows part alors chercher son mari. Dès le début, l’ambiance y semble macabre et l’invité tarde à se présenter…. Quand soudain, un cri résonne dans l’ancienne demeure. Jennifer se lance alors à la recherche de ses amies, Lotte, Anne et Laura, et de réponses à ses questions. La jeune femme se heurte à l’immensité d’un manoir flippant dans lequel se déroule des événements de plus en plus étranges. L’objectif de Jennifer est alors très clair : éviter par tous les moyens un enfant défiguré et nerveux qui se balade une paire de cisailles à la main, le Scissorman.
Le jeu se base en premier lieu sur l’exploration d’une demeure labyrinthique qui cache un bon nombre de secrets obscurs. Son gameplay est axé sur le point-and-click grâce à des interactions avec l’environnement pour se cacher ou encore pour faire face à ses adversaires. Entre survival horror, récit de sorcellerie, et sa petite touche de body horror, Clock Tower met en scène une final girl déterminée à foutre le camp. Son horreur psychologique gialliesque se mêle ainsi à une lutte acharnée pour la survie, à des monstres terrifiants comme l’oppressant Scissorman qui apparait de manière aléatoire et poursuit Jennifer durant sa mésaventure. Les indices laissés ça et là permettent de se développer dans cet imaginaire horrifique, offrant plusieurs fins possibles influencées par les choix du joueur ou de la joueuse. Clock Tower insiste sur l’impuissance de la jeune orpheline sur l’horreur qui se tapie dans l’ombre. Finalement, on passe plus de temps à se planquer derrière les rideaux qu’à faire face à des situations terrifiantes, mais c’est dans l’aléatoire que se trouve le stress de la menace constante du Scissorman qui peut sortir de n’importe quelles cachettes et de nombreuses salles de l’immense manoir. Jennifer dispose alors de deux choix : soit l’affronter directement et partir se cacher ailleurs, soit se planquer le mieux possible en espérant que ce cinglé armé de cisailles ne la repère pas. La barre d’anxiété de la protagoniste équivaut à une barre de vie. Passant du bleu zen au rouge panique, elle marque le niveau de stress auquel Jennifer est confronté. On passe alors de longs moments à se reposer, assise au sol, pour évacuer la panique et prier pour que le monstre ne déboule pas durant cette phase d’immobilité. Plus la panique se retrouvera élevée, plus on devra appuyer frénétiquement sur le bouton pour se défendre, histoire de ne pas finir dans une dead end. Le but de Clock Tower est finalement de se trouver les cachettes les plus efficaces en attendant le moment opportun pour s’échapper, tout en continuant à réunir assez d’indices pour espérer débloquer une échappatoire.
Des meurtres stylisés de ses amies aux salles colorées d’une lumière vive rouge et bleu, Clock Tower reprend énormément à l’esthétique giallo en hommage à ce genre apprécié par son créateur, notamment Suspiria ou encore Les Frissons de l’angoisse pour des éléments de décors effrayants. Les thématiques de la folie, de famille maudite, du tueur fou, de sorcellerie sectaire et de manoir hanté se mêlent à un design simpliste mais bien maîtrisé. Avec une bande sonore rappelant les musiques synthétiques des films d’horreur 80’s, Clock Tower est une sorte de récit gothique, un hommage au giallo qui garde néanmoins ses inspirations à l’horreur japonaise. L’horreur lente, la mise en tension du sujet dans un périple sur lequel il n’a finalement que très peu de pouvoir hormis la fuite, la quête discrète vers des investigations qui donnent des réponses au compte-goutte. Avec ses références et inspirations aux films d’horreur occidentaux et à leur esthétique, Clock Tower joue sur nos angoisses, son suspense. Ici, point de monstres dégoulinants qui popent dans tous les coins, pas de fantômes prêts à nous jump-scarer, le jeu manipule le temps et le silence afin de nous offrir une découverte des lieux qui va crescendo. Le visuel global de Clock Tower permet un storytelling lent et immersif tout en gardant une pression grandissante. Les animations en motion comic ajoutent quant à elles des interludes cinématographiques qui dynamisent la narration.
Les bruits de pas de Jennifer sur le sol du manoir, l’eau qui goutte, les cisailles qui s’entrechoquent en fond, les bruitages dérangeants, et les différentes pièces véritablement horrifiques que la jeune femme va devoir fouiller si elle veut espérer faire toute la lumière sur cette sinistre histoire… et enfin le Scissorman… Un tueur sanguinaire prêt à découper la chair d’un coup de ciseaux géants. Petit et vicelard, il dénote du grand et baraqué Myers de Halloween mais reprend la figure des psychos sanglants de Carpenter ou d’Hitchcock devant lesquels il est souvent plus judicieux de fuir que de combattre. Il emprunte également à la figure de l’esprit vengeur nippon, celui qu’on ne peut pas contourner, et qui regarde en secret sa proie sans que celle-ci en est conscience…
En conclusion, on peut dire que Clock Tower est indéniablement une expérience à vivre pour les nostalgiques du cinéma et du jeu-vidéo d’horreur !






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