Gustave, c’est quoi ?

Jérémy Barlozzo et Douglas Cavanna nous parlent de leur travail sur la série Gustave, la série comico-trash de France.TV

Diffusé sur la plateforme de streaming France.TV, le service de replay et direct tv des chaînes du groupe France Télévisions, Gustave est une série comico-trash qui conte les mésaventure de son héros éponyme tout au long de 20 épisodes de 5 minutes.

Réalisée par Douglas Cavanna, Jérémy Barlozzo et Tom Viguier, l’animation met en scène Gustave, un improbable et naïf canard, qui ne sait s’exprimer que par des coin, coin maladroits ! Flanqué de son ami Pedro, son colocataire aussi égoïste que lourdingue, il va vivre des aventures plus rocambolesques les unes que les autres et rencontrer toute une ribambelle de protagonistes qui semblent tou·te·s sorti·e·s d’un hôpital psychiatrique. Entre un Père Noël junkie, une petite amie désirée activiste et brutale ou encore un groupe de défense pro-canard qui veut lui faire sa peau, Gustave est un incorrigible optimiste qui malgré son physique de antihéros (qui ne ressemble pas trop à un canard) et les violences du monde subies, il franchit tous les obstacles pour atteindre ses rêves.

Produit par Andarta Pictures et Deadliners Production, cette série d’animation est clairement à réserver à un public adulte et averti non seulement par son coté trash, mais aussi par le regard politique qu’elle porte sur notre société. Elle apparaît ainsi comme une production à part dans le PAF et la production audiovisuelle française qui a, malheureusement, plutôt tendance à débiliter le public hexagonal.

Scénaristes et créateurs de Gustave, Jérémy Barlozzo et Douglas Cavanna ont accepté de nous accorder un entretien dans lequel ils reviennent sur leur travail au sein de la série.


Entretien avec les créateurs de la série, Jérémy Barlozzo et Douglas Cavanna

Tout d’abord, je vous remercie au nom de toute l’équipe de TMF de nous accorder cet entretien. Pouvez-vous vous présenter à notre public et parler de votre parcours ainsi que du processus qui vous a conduit à devenir scénariste pour la série Gustave ?

J&D : Merci à vous !

J : Je m’appelle Jérémy Barlozzo et je suis co-créateur de la série avec Douglas Cavanna. J’ai démarré par des études de cinéma. J’ai rencontré Douglas à travers notre expérience de la musique. D’abord, chacun son groupe, puis un groupe en commun. En parallèle, j’ai commencé à me faire la main sur quelques clips avec pour ambition de réaliser de la fiction. Après avoir travaillé sur à peu près tous les postes possibles et imaginables, j’ai fini par réaliser un premier court métrage Je sais pas en 2019. Puis Gustave est devenu une activité centrale dans notre quotidien.

D : Pour ma part, j’ai pas mal navigué entre différents domaines artistiques mais, l’art graphique a pris très tôt une place importante dans ma vie. Cependant, c’est resté très longtemps un loisir jusqu’à ce que Instagram intervienne.

À partir de là, j’ai commencé à poster mes créations pour le plaisir et très vite des client·e·s divers·e·s et varié·e·s sont venu·e·s spontanément me demander de travailler pour eux/elles. Jeremy suivait un peu de loin ce que je postais sur mon compte, jusqu’au jour ou pour m’amuser, je me suis essayé à faire une petite vidéo d’animation très basique dans laquelle un p’tit canard recevait un déluge de mauvaises nouvelles. Ça l’a inspiré et il m’a tout de suite dit qu’il fallait en faire quelque chose.

J : Le personnage m’a tout de suite attiré. Après ce genre d’initiatives « faisons un dessin animé », soyons honnête, la plupart du temps ça reste un fantasme.

D : Ça nous a pris 5 ans, mais au final, même si ça a été pas mal de rebondissements, Gustave existe.

Comment décririez-vous la série Gustave à quelqu’un•e qui ne la connaît pas ?

J : C’est une série d’animation pour adulte assez trash mais pleine de bons sentiments. On suit un canard trop mignon, Gustave, qui vit dans la pire ville de l’univers et pour qui chaque aventure est un vrai parcours du combattant. Cependant, il garde le sourire parce que c’est un idéaliste doublé d’un optimiste.

Quelles sont vos sources d’inspiration pour écrire ces histoires ? Quelles sont vos références s’il y en a ?

D : On est évidemment séduit par les séries adult swim, leurs gestions de l’absurde et leurs capacités à pousser l’écriture et le visuel à l’extrême. C’est cette liberté de ton qui fait vraiment envie et qu’on a envie de voir sur des projets français parce qu’il y a surement un point de vue culturel qui peut amener autre chose. Un autre prisme.

J : C’est sûr qu’après avoir bouffé Les Simpson ou South Park gamins, on a une vision finalement très américanisée qu’on retrouve aussi dans Gustave, mais en y ajoutant un regard français, parfois même sans s’en rendre compte.

D : Au fil des rencontres organisées par nos producteurs, nous avons eu l’occasion de discuter avec des auteurs de South Park ou encore de Rick et Morty et pour eux, c’était évident que le projet ne baignait pas dans leur culture.

J : Et en même temps on trouvait ça cool de pouvoir assumer ça. Et pour les sources d’inspirations du quotidien, disons qu’en 5 ans de productions, avec pas mal de bouleversements en France et dans le monde, on avait l’embarras du choix.

Pouvez-vous nous donner un aperçu du processus de création d’un épisode et de votre collaboration avec les autres créatif·tive·s de la série ?

J : Il faut avoir conscience que le travail s’est étalé sur 5 ans. Donc, beaucoup d’étapes différentes. Et c’est vrai que de travailler en binôme à la création d’un projet comme celui-ci a été assez salvateur. On avait souvent l’impression de se taper dans la main comme au catch. Pour simplifier les choses, il y a d’abord eu une grosse phase d’écriture sur une dizaine d’épisodes. Pendant cette période Douglas travaillait plutôt à la recherche graphique. Pour être très honnête, à ce moment-là, on avait une vision assez floue de tout ce qui allait arriver après. Mais la rencontre de ces premiers épisodes avec les premiers dessins définitifs ou quasi définitifs, c’est ça le vrai déclencheur pour la suite.

D : On a eu la chance d’avoir un diffuseur très motivé par le projet qui a fait des retours assez précis sur les épisodes pilotes tout en nous encourageant à garder cette liberté de ton. Arrive ensuite l’étape du board ou on confie nos visuels et notre découpage à un storyboarder et là, ça devient concret. C’est déjà un dessin animé en soit. Et quand on pense qu’on y est, arrivent les étapes de décors, d’animation de couleur, le studio de doublage jusqu’à la musique. C’est un long processus.

J : Mais, on avait de supers équipes pour nous accompagner à chaque étape. Et c’est assez cool de voir toutes ces contributions de toutes ses personnalités qui se fondent dans l’ADN du projet.

Quels défis rencontrez-vous lors de l’écriture des épisodes de la série ?

D : Le premier défi c’était celui du format. Au début, il faisait une minute puis 7 puis 5. Ça change beaucoup de choses. Et aussi cette volonté d’avoir des épisodes semi-feuilletonnants. C’est à dire indépendants, mais avec une trame de fond. Ce qui oblige à avoir une vision d’ensemble assez tôt.

J : Ensuite, il y a cette nécessité de placer le curseur trash au bon endroit. Ce qui n’est pas évident parce que je pense que notre tolérance à ça est de fait beaucoup plus grande que le grand public. Et quand en plus on y rajoute une dose d’absurde, alors là, on repousse les limites de tout ce qu’il y a de plus clivant. Donc, on a essayé de trouver un équilibre là-dedans. Sans se censurer, en allant là où on se marre et en sachant que ça ne plaira pas à tout le monde. Radical, mais cool. Ça peut être un peu déroutant mais, c’est un vrai challenge et en regardant le résultat, on aurait pu faire certaines choses autrement ! Mais, ça nous fait toujours rire et on n’a pas l’impression de ressembler à autre chose.

D : On avait quand même envie de dérouter.

Qu’est-ce que Gustave ? Il semble être un canard à première vue, mais même ses congénères semblent perplexes devant le physique du pauvre Gustave. Était-ce une volonté de votre part de faire de Gustave un personnage qui ne semble appartenir à aucun groupe pour, peut-être, permettre à tout le monde de s’y identifier ?

D : C’est complètement ça.

J : Déjà, c’est le premier personnage que Douglas me montre. Et tout le reste découle de ce personnage-là. Ce n’est pas juste un canard. C’est la première pierre de toute la série. Quand tu as un design aussi cool ça ouvre le champ des possibles.

D : On voulait à la fois qu’il soit mignon et en même temps complètement limité. Il a des petits bras, des petites jambes. Tu sais d’entrée de jeu que pour lui ça va être une galère.

J : D’ailleurs, ça a aussi été un cauchemar pour les animateur·trice·s au départ. Tu écris plein d’actions à un personnage qui ne peut rien faire.

D : Et ces contraintes, ça nous a obligé à redoubler d’inventivité. Gustave n’est absolument pas adapté à ce monde. Comment il prend un objet ? Il n’a pas de doigts ! Et ben, on a décidé qu’il avait sa manière de faire. Et tout s’est écrit comme ça. Son physique, c’est à la fois ce qui fait qu’on l’aime et ce qui fait que la société dans laquelle il évolue le rejette. On aimait bien cette dichotomie.

Comment sont né·e·s, d’un point de vue du design graphique les protagonistes de la série ? Y a-t-il eu une évolution pendant la phase d’élaboration du projet ?

D : Une fois qu’on avait Gustave, il y a eu une phase de pitch et ensuite beaucoup de blagues entre nous pour définir des profils. C’est pour ça qu’on arrive à Pedro l’éléphant bleu en slip. Jessyfer était une canne au départ. Et puis finalement, on a trouvé ça plus marrant de créer une barrière d’espèce entre Gustave et son crush. Une relation entre un canard et une canne ça renvoyait forcément au physique et là ça rend l’échange moins basique, plus inattendu.

J : Et même ça crée un rapport de taille différent. On a du mal à les imaginer ensemble. Au début, c’était vraiment le sosie de Gustave en fille. Après, plus globalement, Douglas a une passion pour les tétons saillants. Moi je trouve ça drôle, mais on a vu que ça mettait mal à l’aise certaines personnes…

D : Et puis, plus sur la deuxième partie de la production, on a eu beaucoup plus d’échanges en amonts sur la complémentarité entre les scripts et le design et là, c’était vraiment génial. Ça permet d’écrire un peu plus sur mesure.

J : Une de nos plus grandes frustrations, c’est d’avoir dû couper au montage le shar peï crooneur qui chante sa chanson de noël dans les nuages dans l’épisode 9. Le cheminement c’était vraiment : « On veut une parodie de Michael Bubley… Appelons le Mr Burley ! Qu’est-ce qui a des bourrelets ? Un shar peï » Voilà. Des fois ça prend 5 minutes, des fois ça prend des semaines. Et puis ensuite Douglas dessine et on rigole. Ou pas !

D : Mais du coup on a mis la chanson sur l’Insta de Gustave, @gustavecoin. Instant promo dans l’instant promo.

Pourquoi avoir choisi des personnages ayant la forme d’animaux plutôt que des humain·e·s ? Était-ce un choix présent dès le début de développement de la série ?

D : Depuis le début, l’idée c’était de mélanger des animaux et des humains. Déjà, ça crée un décalage marrant qu’on aimait beaucoup dans BoJack Horseman. Et on a essayé d’utiliser cette intention à notre sauce. Bon très simplement, un design animal ça permet d’utiliser d’autres caractéristiques physiques ou psychologiques pour justement raconter des choses humaines. Et puis, dans notre cas ça rajoutait au côté foisonnant de l’univers. Et ou on voit tout de suite la dynamique d’un personnage. Dans un programme de 5 minutes ça permet de gagner pas mal de temps.

Tout au long des épisodes, le pauvre Gustave subit des violences sans nom ! Malgré tout, mu par un optimisme sans faille, Gustave ne s’arrête jamais et franchit tous les obstacles qui se lèvent contre lui pour atteindre ses rêves ! Le personnage était-il déjà pensé comme cela dès le début du projet ?

J : Dans son premier test, Douglas avait déjà écrit un personnage qui subissait pas mal de pressions psychologiques, de méchancetés. Et qui finissait par tourner la situation de manière positive. C’est ça qui m’a séduit aussi. Cette mentalité de voir l’aspect positif des choses. C’est tellement éloigné de moi dans la vie que j’y ai vu un truc vraiment fort, et universel !

D : Après, on y a ajouté des aspects plus physiques et forcément, ça pose question. On ne voulait pas non plus que Gustave devienne un chewing-gum. Et donc, au fil de la série, il s’affirme de plus en plus et son coté punching-ball devient une sorte de super pouvoir.

J : Une super capacité à encaisser et toujours avancer. On a toujours voulu traiter les blessures de Gustave de manière subjective. C’est spectaculaire et très amplifié parce qu’on les traite de son point de vue. Et vu le décalage qu’il y a entre lui et son environnement, ça prend des proportions dingues.

D : Mais ça a été un long questionnement.

Alors que notre société promeut souvent l’esprit carnassier et égoïste, le personnage de Gustave semble en complet décalage avec ces valeurs. Pensez-vous, malgré tout, que Gustave de par sa ténacité, sa générosité et son innocence peut être une source d’inspirations pour le public ?

D : On espère.

J : La grande catchline de notre note d’intention c’était « Ce n’est pas Gustave qui change le monde, c’est le monde qui change au contact de Gustave. ». L’idée c’est que « semer des choses positives ça finit par donner des résultats positifs même si ça prend du temps ».

Le monde de Gustave est un monde très violent et la plupart des personnages semblent être des psychopathes tout droit sorti•e•s d’un asile ! Pourquoi avoir fait ce choix d’une violence omniprésente et pensez-vous qu’elle est représentative de notre époque ?

J : Quand on a démarré il y a 5 ans c’était déjà anxiogène.

D : On a pas vraiment senti d’amélioration en 5 ans. Et puis, on vit à Paris et j’ai le sentiment qu’il y a la nécessité de mettre une carapace pour ne pas être atteint par le côté déshumanisé de beaucoup d’interactions quotidiennes. On a vu pas mal de problématiques cristallisées à Paris de manière assez agressive et il faut trouver un moyen de faire avec au quotidien. De se créer un filtre. De continuer à voir le côté positif des choses. Ce que Gustave fait beaucoup mieux que nous. Ce qu’on prend pour juste de la naïveté en fait c’est un putain de courage !

J : Je me souviens de comment le JT de 20 heures me paraissait hyper violent quand j’étais gamin. Je ne sais pas si c’est le décalage des années qui amplifie ce souvenir, mais je n’aimerai pas être moi à 6 ans en train de regarder les infos d’aujourd’hui. Alors on a forcé le trait, mais en fait, il y a aussi des épisodes ou on a été rattrapé par l’actu et où je trouve qu’on aurait pu être plus mordants !

D : Le choix de la violence, c’est à la fois une manière de se confronter à une réalité et aussi un moyen de s’en libérer. Mais ça ne marche pas pour tout le monde.

Malgré le traitement décalé, vous abordez dans la série des thématiques d’actualité comme le problème des punaises de lit, le racisme, le harcèlement sexuel. La série apparaît comme une lentille grossissante du monde dans lequel nous vivons. Est-ce important pour vous d’ancrer vos histoires dans l’actualité en abordant des problématiques importantes de nos sociétés ?

J : Oui forcément. Et en même temps, il faut bien se rendre compte que les épisodes ont été écrit il y a 4 ans. On aimerait que certains problèmes ne soient plus d’actu. Par exemple on ne s’attendait pas au retour de hype des punaises de lit !

D : C’est tout l’intérêt de l’animation. Le côté lentille grossissante ça permet de s’emparer de certains sujets en allant beaucoup plus loin et justement de prendre ces sujets en les tordants et en les amenant ailleurs. On essaye de rendre le truc ludique. En live, ça serait beaucoup plus glauque même si cette année, Ari Aster a mis en image notre vision parfaite de Moisiville dans la première demi-heure de Beau is Afraid !

J : Et, on s’est tous les deux dit que c’était un putain de tour de force de matérialiser toute cette folie, toute cette violence frénétique et comment ça imprègne un personnage perdu au milieu de ça. Scorsese s’est dit pareil d’ailleurs. Comme quoi les grands esprits…

D : Non.

J : Non.

Y a-t-il des épisodes qui vous ont posé plus de difficultés quant aux thématiques abordées et pour lesquels vous auriez pu craindre une censure en pensant à la réaction du public et du diffuseur ?

J : La censure du public est arrivée beaucoup plus vite que celle du diffuseur. On a été surpris de voir à quel point les gens ont réagi avec véhémence sur des points assez basiques.

D : Évidemment qu’aborder le racisme ou les violences sexistes ça pose des questions de positionnement en termes d’écriture et en même temps, on n’avait pas envie d’être tièdes sur ces questions-là. Parce que ça nous parait trop important.

J : Donc, on a traité ça souvent en sous-texte pour pas juste « bastonner » des trucs aussi évidents que « le racisme c’est mal » ! Mais en même temps, ça aurait été impossible pour nous de ne pas transmettre ces valeurs-là alors qu’on a un espace pour ça.

D : Et que ça nous révolte tout simplement d’en être encore à dire des évidences. Donc, on continue de le faire.

J : Aimons-nous les uns les autres.

Qu’est-ce que vous espérez que le public retienne de la série Gustave ?

J : Je crois qu’on espère qu’il s’attache à ce personnage positif et que par élimination, le public se dise que ce n’est pas une bonne idée d’agir comme tous les personnages qui l’entourent et qui ne sont pas cool… globalement.

D : Et puis, que les gens s’amusent aussi.

Quels messages ou thèmes souhaitiez-vous transmettre à travers la série ?

J : La persévérance. C’est facile de céder à la frustration.

D : Même si le résultat n’est pas immédiat ça ne justifie pas de se comporter comme une merde !

J : Voilà. Aimons-nous, bordel !

Avez-vous rencontré des difficultés, du fait son ton trash, à convaincre des diffuseurs de l’intérêt et des qualités, évidentes, d’une série comme Gustave au début du projet ?

J : On a rapidement trouvé des prods qui nous ont fait confiance et un diffuseur qui avait envie d’aller au bout de cette idée. Donc des difficultés pas vraiment.

D : La vraie difficulté, ça a été pour nous de construire ce rapport à la violence. Que ce ne soit pas gratuit. Et je pense que c’est plus facile à saisir à la vue de la saison au complet. On a conscience qu’il y a un public pour ça, mais il faut aller à sa rencontre.

J : Et ce public, ce n’est pas forcément le public de France TV Slash. Il faut accepter ça. Ça va prendre un peu de temps. Mais on a eu la chance d’arriver au bon moment pour ça.

D : Ce qui est compliqué, c’est qu’on assume un dessin pop et un peu enfantin et que la violence qui entre dans ce graphisme-là choque plus facilement les gens que dans le manga par exemple. Dragon Ball Z gamin, c’était plus violent que Gustave. C’est aussi une histoire de visuel qui peut surprendre le public.

La série Gustave est une série clairement adaptée à un public adulte et averti, non seulement par son côté trash, mais aussi par le regard politique qu’elle porte sur notre société. Elle apparaît ainsi comme une production à part. Pensez-vous qu’une telle série soit « nécessaire » dans le paysage audiovisuel français qui apparaît assez aseptisé et frileux à aborder des thématiques d’actualité ?

J : Je ne pense pas qu’un projet soit plus nécessaire qu’un autre. En revanche, le fait qu’un diffuseur comme France.TV prenne le risque de produire des projets de ce type, c’est ça le vrai point positif.

D : Qu’on arrive à une diversité de projet avec une liberté de ton. Évidemment, il y aura des hauts et des bas, mais c’est forcément une chaine vertueuse. Et c’est vrai que ça manque un peu dans le paysage global.

J : Mais, on a aussi senti un vrai intérêt pour ça et on a vu que c’est compliqué à monter. Cependant, il y a de plus en plus de productions et de diffuseurs qui ont envie d’y aller.

D : On est d’autant plus reconnaissants du travail effectué par nos prods Deadliners et Andarta et la prise de position de France Tv Slash.

Y a-t-il une spécificité dans l’écriture d’une série d’animation par rapport à un film/court-métrage par exemple ?

J : Il y en a à peu près mille. Mais en même temps, la liberté qu’on nous a laissé sur ce projet, je la souhaite à tout·e jeune créateur·trice qui démarre. On a certainement fait des conneries, mais en même temps, quel plaisir ! Et j’espère que le temps nous donnera raison… Il y a plein de bouquins supers sur l’écriture de scénario, mais je ne les ai pas lus.

Comment percevez-vous l’importance des dessins animés dans la société actuelle ?

D : Dans le dessin animé, tu peux te permettre d’exagérer des choses sans que ce soit grossier. De par l’aspect des persos, tu peux tordre des choses et préserver une forme de crédibilité. Créer un univers de toute pièce pour permettre au public de se détacher d’une forme de réalité, d’aller plus loin d’une manière plus acceptable peut être.

J : Je pense qu’on conçoit encore le dessin animé comme quelque chose de trop enfantin. En France en tout cas. Alors qu’il y a plein de petites révolutions et qu’en plus, on a les meilleurs animateur·trice·s au monde.

Quels sont vos films et séries d’animations préférés ?

D : Le Roi et l’oiseau. Tout support confondu. Ce film a façonné mon imaginaire. Et pas que le mien. Hayao Miyazaki s’en inspire à fond. Dernièrement, Smiling Friends, ça a été un gros coup de cœur. Mr Pickels qu’on adore tous les deux. Et les films en pâte à modeler russes que mes parents me faisaient regarder petit. Très glauque.

J : Moi j’ai été biberonné au Disney. J’en ai vu un paquet en salles. Gamin, je kiffais bien les Tortues Ninjas et les premiers Marvel en dessin animés, je suis toujours fan. Le générique d’X-men, un chef d’œuvre ! Ado, j’ai été complètement choqué par Perfect Blue. South Park à fond au lycée. Et je pense que Bojack Horseman, c’est vraiment la ref’ ultime pour moi actuellement. Si je devais écrire un projet, je voudrais que ce soit ça !

Avez-vous d’autres projets à venir ? Ce serait quoi votre rêve le plus dingue ?

J : Pendant la production de Gustave, j’ai eu le plaisir de jouer dans Polar Park, une série qui n’a pas trop mal marché sur Arte. Et Douglas a fait la BO du film Vermines. Donc, on sort d’une fin d’années 2023 assez dense et où je pense qu’on a envie de continuer à explorer tous ses horizons en même temps.

D : Oui voilà, continuer à faire ce job. On sort de 5 ans où on a écrit, réalisé, fait du doublage, fait de la musique. Où on a bricolé. Où on a travaillé avec des grosses équipes et puis des petites, et à chaque fois, on apprend des choses en faisant tous les trucs qu’on aime. Donc, continuer ça serait déjà bien.

J : Et puis le rêve fou, ça serait que Gustave fasse son chemin et qu’on puisse faire la saison 2…

Pour terminer, avez-vous un message à transmettre au public et aux aspirant·e·s scénaristes ?

J : Allez voir Gustave sur France.TV ou sur Youtube. Et, si vous allez sur YouTube, laissez un commentaire cool, parce qu’on lit les commentaires. On est des humains et il y a eu des commentaires méchants.

D : Et comme dirait Van Drame, on n’aime pas les méchants…

J : Et ni les communistes. Voilà, pour comprendre il faut regarder maintenant. Et pour les aspirant·es scénaristes, soyez patient·e·s parce que c’est putain de long ! Mais, si vous êtes bien entouré·e·s et que votre idée vous porte, ça vaut le coup !

D : Et, on en profite encore pour remercier toutes les équipes qui ont travaillées sur le projet. Elles sont nombreuses.

J : Il suffit de regarder le générique pour s’en rendre compte. Mais, de la fabrication au casting, on a eu beaucoup de chance et c’était un bonheur de faire ça avec tous ces gens. Donc pour conclure, le message au public est un message de paix et d’amour. Partout. Tout le temps !


Auteur / autrice

  • Lord Humungus

    « There has been too much violence. Too much pain. But I have an honorable compromise. Just walk away. Give me your pump, the oil, the gasoline, and the whole compound, and I’ll spare your lives. »

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